Le contexte politique actuel, faisant planer une potentielle arrivée au pouvoir d'un parti d'extrême droite en France, nous mène à alerter sur les conséquences d'un tel scénario, incompatible avec nos valeurs et notre mission associative.
Le 9 juin, Emmanuel Macron annonçait la dissolution de l'Assemblée nationale suite à la défaite de son parti Renaissance aux élections européennes face au Rassemblement National (RN). Nous sommes alors toutes et tous rappelés aux urnes pour élire de nouvelles et nouveaux députés les 30 juin et 7 juillet en hexagone et les 29 juin et 6 juillet dans la majorité des territoires dits d’outre-mer. Cette décision du Président de la République, irresponsable mais non moins stratégique, précipite ainsi le RN aux portes du pouvoir.
Pour justifier sa décision, Emmanuel Macron a prétendu vouloir redonner la main au peuple. Un peuple devant lequel, au soir du second tour de l’élection présidentielle de 2022, il reconnaissait que les votes en sa faveur avaient pour objectif de faire barrage au RN. Pourtant, par cette dissolution, il rejoue la partie dans un contexte où le RN est plus fort que jamais, prenant volontairement le risque de laisser les clés de Matignon à un mouvement d’extrême droite.
Des fondements incompatibles avec les valeurs républicaines, un danger pour notre démocratie
Oui, nous l’affirmons, le Rassemblement National est un parti politique d’extrême droite tel que rappelé par le Conseil d’Etat récemment. Ce type de mouvement se définit par “une critique radicale de la démocratie au nom d’une idéologie autoritaire, raciste et nationaliste tendant à exclure une partie des individus de la nation et/ou de la citoyenneté”. Nous le rappelons, le parti (anciennement appelé Front National) a été fondé par Roger Holeindre, membre du groupe terroriste OAS; François Brigneau, milicien du régime de Vichy, Jean-Marie Le Pen, négationniste, révisionniste, tortionnaire en Algérie et Pierre Bousquet, nazi. Un parti aujourd’hui présidé par Marine Le Pen, héritière de ce mouvement aux fondements idéologiques antisémites, racistes, sexistes et xénophobes.
En tant qu’association d’abord et ayant par ailleurs une mission dont les publics bénéficiaires sont originaires des territoires dits d’outre-mer, nous sommes particulièrement inquiets à l’idée qu’un mouvement d’extrême droite gouverne la France.
Nous sommes d’autant plus inquiets dans la mesure où nous avons déjà vécu des expériences de pratiques autoritaires sous la présidence d’Emmanuel Macron, dont les gouvernements successifs ont été interpellés et épinglés par plusieurs organisations françaises de protection de nos libertés individuelles et collectives comme la LDH, Amnesty International, mais aussi par l’ONU ou encore le Conseil d’état. Qu’en serait-il si un mouvement d’extrême droite prenait le pouvoir ?
NON, nous ne souhaitons pas “essayer” et SI, nous savons ce que cela entraînerait comme conséquences
Nous savons bien ce que le RN fera en tant que gouvernant puisque que ses alliés du Parlement européen et soutiens lors des échéances électorales françaises, actuellement au pouvoir en Hongrie, en Italie ou encore en Pologne sont déjà à l'oeuvre : suppression de l’équivalent du RSA; augmentation du temps de travail; Facilitation des licenciements; Fin du droit à l’IVG, Déforestations accélérées, Nouvelles règles structurelles pour se maintenir au pouvoir, Attaques à l’indépendance des médias; Vagues de violences racistes, antisémites, islamophobes et LGBTQIphobes etc…
En France, nous n’y échapperons pas et les associations dont la raison d’être repose sur des valeurs telles que la solidarité, la dignité, l'ouverture, la coopération, le partage, l'entraide, la fraternité, l'empathie, la justice… seront attaquées et empêchées dans leur pouvoir d’agir (elles le sont déjà dans les communes ou le Rassemblement National est aux commandes), puisque leurs activités, nos activités, sont incompatibles avec le principe phare du RN qui prône la “préférence nationale” (= “ français de souche”). Son allié hongrois a par exemple été condamné par la Cour de Justice de l’Union Européenne pour avoir restreint les financements des organisations civiles.
Le Mouvement associatif, qui représente près de la moitié des associations de France et appelle au développement d’une politique de vie associative à la hauteur des enjeux vers une société plus juste, plus durable et plus humaine nous le rappelle : les valeurs associatives sont incompatibles avec l’extrême-droite.
L’ADN des mouvements d’extrême droite est incompatible avec les valeurs portées par les peuples ultramarins et leur Histoire
L’extrême droite c’est ce mouvement colonialiste qui célèbre Napoléon Bonaparte (criminel de guerre et contre l’humanité ayant rétabli l’esclavage et batî la richesse de la France sur le dos ensanglanté des personnes réduites en esclavage).
C’est un soutien au mouvement anti-indépendantiste de Nouvelle Calédonie qui bafoue les droits du peuple Kanak ayant déjà perdu nombre de ses membres.
C’est un mouvement anti-migration semant division, haine et terreur à Mayotte plutôt que de travailler au renforcement de la paix sociale par la diplomatie et l’aide internationale aux pays voisins et au respect de la loi dite “d’égalité réelle Hexagone-Outre-mer” en matière de développement économique et social.
Nous le disions plus haut, une des mesures phares du programme du RN porte sur “la préférence nationale”, principe contraire à la Constitution mais aussi à la Charte des Nations unies en son article 1er, qui appelle au “respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes”.
Leurs députés.es ont par ailleurs votés.es contre la condamnation de toute forme de racisme et la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité.
Tout ce à quoi nous aspirons pour les peuples ultramarins en tant qu’association, l’extrême droite le détruit
Inutile de rappeler que les territoires et peuples ultramarins font face à d'immenses enjeux tels que l’accès à l’eau, la pauvreté, le chômage, l’accès aux services publics, à une alimentation saine, sont en première ligne des effets du dérèglement climatique et empêchés dans leur entreprise d’auto-détermination.
Ce que nous voulons :
Des dispositifs qui nous permettent de vivre dignement et des services publics à la hauteur
Le RN a voté contre la hausse du SMIC, le gel des prix des loyers, la revalorisation des salaires, la gratuité des cantines pour les plus modestes, un revenu digne pour nos agriculteurs…Le parti veut réformer les aides sociales avec un forfait unique : de nombreux allocataires verront leurs aides réduites puisque leurs spécificités ne seraient plus prises en compte (handicap...) et compte supprimer 150 000 postes de fonctionnaires sur 5 ans.
Un environnement sain pour une santé préservée
Le RN n’ a pas voulu reconnaître la responsabilité de l'État et l’indemnisation des victimes du chlordécone, il a voté contre la réduction de l’utilisation des pesticides et affirme ne plus vouloir les interdire !
L’extrême-droite, c’est un mouvement anti-social et anti-écologique mais c’est aussi davantage de répression policière et judiciaire puisque le RN prévoit d’instaurer la présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre, soit un permis de tuer où la légitimité de l’acte ne serait pas prise en compte par la Justice. Les militants y sont déjà confrontés, notamment dans la lutte contre le chlordécone et l’accaparement des terres mais c’est aussi l’exemple de Claude Jean-Pierre, dit Klodo, tué en Guadeloupe par des gendarmes lors d’un contrôle routier.
Non l’extrême droite ce n’est pas le changement. Sinon le changement, pour le pire.
Nous avons le pouvoir de voter pour améliorer nos conditions de vie et pour des valeurs qui nous unissent
Nous appelons toutes les organisations, coalitions, militants et militantes engagées pour les outre-mer à se mobiliser pour faire élire les candidats qui portent nos valeurs et portent des mesures sociales et écologiques dont l'objectif est d’améliorer le bien-être de toutes et tous tant au niveau individuel que collectif.
Cette lutte que nous menons pour notre dignité, notre liberté et pour la paix se joue aussi dans les urnes. Nous avons rendez-vous avec l’histoire, soyons à la hauteur.